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Bi, je t’aime un peu, beaucoup, pas du tout,…

Les hétéros les considèrent comme un effet de mode, les homos comme des «leurs» qui ne s'assument pas. Pour les bi, qui s'activent de plus en plus en Suisse romande, il faut casser les clichés.

Qui s’en est aperçu ce jour-là? Sans doute bien peu de monde. Dans le joyeux cortège de la gay pride de Lausanne, l’an dernier, des membres du Club Isis, un club de rencontres réservé aux femmes bisexuelles, ont été violemment prises à parti. Le problème? Leurs tenues voyantes et les photos érotiques décorant leur stand n’ont pas plu à d’autres participantes… Simple incident, mais qui démontre à quel point les bisexuel(le)s ont encore du travail à accomplir pour leur reconnaissance.

En Suisse romande, justement, on s’y active depuis peu. En 1997, à l’initiative de Sandrine Pache, se créait à Lausanne le premier groupe bi romand. Symptomatique: c’est dans le cadre de Vogay, association homosexuelle où les femmes ne sont guère présentes, qu’elle a pu développer son projet. «Nous avons été très bien accueillis», souligne Sandrine Pache, «mais il faut le reconnaître, c’est souvent au sein même de la communauté homosexuelle que nous avons le plus de peine à être reconnus». Car s’il existe un idéal communautaire profond qui refuse l’intolérance et les attitudes d’exclusion, la réalité et les faits, à l’image de l’incident de la gay pride, le contredisent parfois. Quant au regard des hétéros, il est souvent assez réducteur. Hyper médiatisée, la bisexualité, suscitant les fantasmes, est souvent considérée comme un effet de mode. «Disons qu’en termes de reconnaissance de la bisexualité, on en est au stade où se trouvait l’homosexualité, il y a 15 ans», dit encore Sandrine Pache, convaincue toutefois qu’une meilleure reconnaissance, grâce au chemin déjà parcouru par les homosexuels et une société globalement plus tolérante, est en marche.

Mixte, le groupe bi de Vogay s’occupe activement de promouvoir l’identité et la visibilité des bisexuels, en menant des campagnes d’information et de prévention, et en offrant notamment une permanence téléphonique, un lieu de rencontre et un centre de documentation.

Le Club Isis, sis à Lausanne lui aussi, est moins politisé et recherche la convivialité. Exclusivement féminin, il propose des rencontres bimensuelles dans une atmosphère parfois teintée d’érotisme. Créé il y a juste plus d’un an, ce club connaît un tel succès que les réunions se sont multipliées. Les femmes viennent de toute la Suisse romande pour participer à des sorties, initialement prévues au rythme d’une toutes les trois semaines. Depuis janvier 1999, la cadence est passée à deux sorties par mois. Les petites annonces invitant aux soirées ont le mérite d’être clair. Deux critères sont impératifs pour y participer: être une femme et être bi. Quant aux activités – «Loisirs et plus si entente» – elles sont évidemment facultatives. Nombreuses, nous dit-on, sont les femmes qui, encore incertaines peut-être au sujet de leur inclination sexuelle, trouvent dans ces soirées une intimité et une similitude d’identité leur permettant de se reconnaître ou non, et ainsi de mieux se définir. D’autres femmes, la majorité, vivent en couple hétérosexuel et voient en Isis la seule opportunité de rencontrer d’autres femmes ayant la même sensibilité.

Les loisirs organisés sont divers, et si les hommes bisexuels ne sont pas admis, c’est pour préserver une ambiance féminine autant que pour éviter toute friction dans les couples. L’accent est en effet mis sur la transparence et le dialogue franc. Ici, on n’encourage pas la clandestinité. La responsable estime en effet que pour qu’une femme vivant en couple hétérosexuel puisse harmonieusement fréquenter le Club, il est indispensable que son partenaire sache et accepte ce qu’elle décrit comme un «enrichissement intérieur, grâce au partage d’une complicité entre femmes». La mise à l’écart des hommes, dans ce contexte, se justifie par la volonté d’éviter que les partenaires «officiels» n’y voient un contexte propre à éveiller un sentiment de rivalité. Ils sont d’ailleurs conviés à intervalles réguliers afin d’éviter que ne naissent trop de fantasmes déplacés autour des soirées féminines.

Clichés médiatiques
Entre l’activisme du groupe bi de Vogay et ce club de rencontres, les objectifs semblent loin d’être les mêmes. Cela pose-t-il problème? «Non, car justement l’essence même de la bisexualité réside dans sa diversité. Toute tentative pour la décomposer, la réduire à une valeur unique, équivaudrait à la nier», souligne Sandrine Pache. Et d’ajouter que s’il existe un point commun dans toutes les formes d’expressions de la bisexualité, c’est bien la conscience intime que rien n’est ni noir, ni blanc. Le rejet initial des femmes bisexuelles par les mouvements lesbiens est un rappel permanent que les attitudes figées et rigides ne peuvent mener qu’à l’exclusion. Au Club Isis également, on parle de complémentarité et de manières parallèles, voire même convergentes, d’exprimer les diverses facettes d’une même sensibilité.

La volonté de donner une visibilité à cette identité souffre aussi de l’écho qu’en donnent parfois les médias. Souvent considérée comme effet de mode, la bisexualité ne fait parler d’elle que lorsque l’actualité la place sous les projecteurs. La sortie du film «Gazon maudit» notamment – qui n’avait pourtant rien à voir avec le sujet – avait donné lieu à une série d’articles traitant de la bisexualité. La difficulté à maîtriser une image qui fait souvent flirter bisexualité avec instabilité sexuelle incite les responsables de groupes à une certaine prudence. Echaudée à la suite d’articles plus sensationnalistes qu’informatifs, Sandrine avoue une certaine lassitude à voir éternellement colportés les mêmes clichés réducteurs et souvent erronés sur la bisexualité. Pour commencer celui qui réduit la bisexualité à sa seule dimension sexuelle. Mais cette exaspération existe également dans la communauté gay. Chez Isis, dont le club exclusivement féminin attise toutes sortes de fantasmes masculins hétérosexuels, on est encore plus méfiant: «Il faut être extrêmement prudent pour que le message passe de façon juste», dit son animatrice.

Difficile de casser les clichés, d’autant plus que la mobilisation des bi ne va pas de soi. A témoin, en Suisse, une coordination nationale bi s’était constituée après la conférence sur la bisexualité de Berlin en 1996, mais ses activités sont aujourd’hui considérablement ralenties. En février dernier a aussi eu lieu la première BiFest Pride à Londres, dont le succès fut très confidentiel. On peut donc s’interroger sur la pérennité et l’ampleur de ces mouvements. En Suisse romande, qui s’affiche comme bisexuel? Chez Vogay, les membres actifs sont également répartis entre les deux sexes. Mais là s’arrête la parité. Le groupe est en effet représentatif de l’identité bisexuelle, donc aussi multiple et diversifié que ses membres. Les horizons sont très différents et correspondent aux chiffres donnés par une étude américaine menée en 1993 déjà. On y apprend que 35% des personnes actives au sein d’un groupe bi ont d’abord appartenu aux groupes lesbiens ou féministes, 45% s’identifient d’abord comme hétérosexuels alors que 10% se reconnaissent bisexuels depuis toujours. Mais, alors que BINe, l’association faîtière suisse, annonce que quelque 20% de la population serait bisexuelle, seule une infime minorité s’en réclame ouvertement. «La majorité est silencieuse», dit Sandrine, car «l’intérêt des bisexuels à être identifiés n’est pas évident».

Coincés entre le regard souvent dénigrant de la communauté homosexuelle, pour laquelle les bis seraient des homosexuels qui refusent de s’affirmer, et l’incrédulité parfois teintée d’envie d’une communauté hétérosexuelle qui y lit un effet de mode, lorsqu’elle ne fantasme pas sur une vie qu’elle imagine débridée, il est évidemment plus facile de ne pas se manifester. Revendiquer pendant les moments où l’on se trouve classé parmi les minorités, lorsque l’on a une vie affective qui permet – à temps partiel au moins – de se fondre dans la masse demande une assurance certaine plus un goût prononcé pour affronter clichés et rejets. Mais la situation s’améliore, et la Suisse n’est pas à la traîne. Alors qu’il existe sept associations en Suisse par exemple, il n’y en a que deux pour toute la France. L’isolement dans lequel les Romands se trouvaient, il y a encore peu, lorsqu’ils prenaient conscience de leur différence, ne devrait plus aujourd’hui affecter ceux qui cherchent des réponses. L’accessibilité de l’information devrait accélérer le processus de reconnaissance individuel et communautaire. Un atelier se tiendra d’ailleurs dans le cadre de la semaine d’animations organisée à l’Usine du 7 au 10 avril.

Groupe Bi de Vogay
Permanence téléphonique et réunions de travail et conviviales mensuelles.
Pour tout renseignement: tél 021-646 25 35 ou email: vogay@worldcom.ch

Club Isis (femmes uniquement)
079-637 95 48