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Le coming out de Suisse Tourisme

Le coming out de Suisse Tourisme

Attirer sur nos montagnes et pittoresques villes les homos américains et anglais: tel est l’objectif de Suisse Tourisme, qui vient d’éditer un guide avec des adresses quelque peu fantaisistes.

Le guide propose neuf destinations, certaines citadines, dont Genève et Lausanne, ou plus montagnardes, comme Arosa ou Davos. Intitulée It’s Only Natural, la brochure présente aux «segments» américains et britanniques une Suisse préservée et pittoresque. Lorsque l’on parle business, les homos ne forment en effet plus une communauté, mais un segment… juteux. Des études marketing montrent que les gays et lesbiennes américains voyagent plus que leurs concitoyens hétéros et qu’ils partent plus facilement à l’étranger. Et, bien sûr, beaucoup font partie de cette catégorie de personnes que le délicieux langage du marketing qualifie de manière si poétique de Dinks, les «double income no kids». Ces études nous apprennent par ailleurs que les homos américains aiment visiter les curiosités et musées, découvrir la culture locale, manger, faire du shopping… Bref, le touriste gay semble être un touriste comme les autres, mais en moyenne plus fortuné.
Sachant que ce segment est beaucoup plus réceptif lorsque l’on s’adresse à lui au travers de canaux spécialisés et de campagnes estampillées homos, Suisse Tourisme développe une communication très ciblée. Présence dans les salons LGBT, sur les sites Internet et dans la presse communautaires, sont associés à la publication du guide. «Nous sommes déjà actifs depuis plusieurs années dans ce segment en Grande-Bretagne. Mais nous avons pris conscience de la possibilité de nous adresser directement à la communauté homosexuelle. Dans ce pays, elle est très active et dispose de nombreux canaux de communication», explique Véronique Kanel, porte-parole de Suisse Tourisme. Si cette première campagne est axée sur les marchés américain et britannique, Suisse Tourisme lorgne aujourd’hui également sur la communauté homo française.
Cet effort d’ouverture est strictement commercial. On peut se demander jusqu’à quel point nos amis homos d’outre-Manche et d’outre-Atlantique seront acceptés lors de leur prochaine visite à Arosa ou Engelberg. «Pour qu’un partenaire s’engage dans cette campagne, il faut que toutes ses infrastructures touristiques soient prêtes à accueillir ce type de clientèle», précise V. Kanel. On espère donc que le message soit passé, et que le type du téléphérique à Zermatt ne sera pas trop choqué lorsque Bob et Matt échangeront leurs salives afin de tuer le temps dans la file d’attente. Mais soyons optimistes: comme pour les «queers» de TF1, il s’agit d’un pas en avant supplémentaire. Même si les motivations ou la manière sont discutables.

Adresses farfelues?
A la lecture des pages consacrées à Lausanne et Genève, la rédaction de 360° a été quelque peu interpellée (lire également notre test en page suivante). D’abord, une bonne partie des adresses présentées ne sont pas des lieux fréquentés par des homos. «Le gay qui voyage est une personne cultivée et informée qui sait comment trouver les adresses gays. Nous ne voulions pas faire un guide strictement homo», explique Philippe Kühne, directeur marketing et ventes de Lausanne Tourisme. Soit dit en passant, nous voilà rassurés d’apprendre que les gays sont des personnes cultivées. Plus sérieusement, on ne s’étonne pas que le guide ne donne pas les adresses des parcs ou des toilettes publiques. Mais pourquoi ne pas mentionner les Jungles, Trixx, et le 43-10? «Il est vrai que nous aurions peut-être dû mettre un ou deux clubs plus branchés. Nous rectifierons le tir dans la prochaine édition. Tout le monde cherche à s’améliorer!» Dans les pages genevoises, ô surprise, Le Phare, un des bars les plus courus, n’est pas mentionné, alors qu’y figure le Lollipop, fermé depuis trois ans. Genève Tourisme dit s’être basé sur une liste fournie par Dialogai. L’association renvoie quant à elle la balle à Genève Tourisme.

Les gays font-ils fuir les touristes?
Cet élan d’ouverture commercial vers la communauté homo ne fait pas toujours l’unanimité. Genève Tourisme s’était lancé dans le marketing ciblé homo lors de la Pride de juillet dernier.
L’office du tourisme et les organisateurs avaient négocié un accord selon lequel le logo des premiers figurerait sur le matériel promotionnel des seconds, moyennant une contrepartie financière. Pourtant, selon les organisateurs, ce n’est qu’en faisant pression qu’ils ont pu obtenir le paiement de cette somme. «Nous avons négocié ce contrat de partenariat avec la direction exécutive de Genève Tourisme. Cependant, nous avons réalisé que son Conseil d’administration, quelque peu ringard, n’était pas enchanté de cette collaboration.», explique Ian Clavel, membre du comité Pride 04. Lors d’une réunion avec les autorités cantonales, un membre de ce Conseil se serait en effet insurgé contre le défilé, prétextant un manque à gagner pour les commerçants. Les organisateurs y ont plutôt décelé de l’hostilité pure et simple. Du côté de Genève Tourisme, on réfute: «Si, dans un premier temps, nous n’avons pas voulu payer cette facture, c’est que le montant ne correspondait pas à celui que nous avions négocié. Lorsqu’il a été revu à la baisse, nous l’avons payé immédiatement. Nous menons clairement une politique de promotion de ce segment», selon Beat Dreier, sous-directeur en charge du marketing. Une politique de promotion qui ne fait pas non plus l’unanimité du côté des usagers. Dans Le Matin du 11 juillet dernier, on apprenait d’un consultant du Beau-Rivage Palace que les touristes du Moyen-Orient avaient boudé Genève car «ils détestent la Gay Pride et ses débordements».

Jouons au touriste

Alléché par la sélection du guide de Suisse Tourisme, 360° a dépêché ses plus fins limiers sur le terrain. Compte-rendu circonspect.

Genève

L’Alhambar
Jusqu’à perdre haleine, nous fourrageons à travers la cohue du samedi soir et les rideaux de verroterie. Quand ce n’est pas une grue qui nous écrase l’orteil, c’est une projection vidéo qui nous crève l’œil. Arrimés au bar, bref repérage circulaire: c’est très jeune minette et joli minois tout ça. Certes, très sympa mais pas pédé pour un sou. Quoique peut-être un ou deux dans le coin…

La SIP
David n’a pas pu entrer parce qu’il portait des baskets pourraves. Amers, nous revenons chaussés par Bally et Gucci. Sur les étages d’un ancien site industriel se trémousse la middle class society du bout du lac. Bellâtres à la pelle (à tarte) et midinettes overdiorisées s’enivrent d’une sono devenue tambourin. Des pédés dans la salle? Non et re-non. Mais nos pompes ruinées. Oui et re-oui.

Le Lollipop
Courageux ceux qui par une nuit pluvieuse arpentent le quartier de l’hosto. A l’adresse dite, mouillés comme des soupes, nous trouvons porte close. Renseignements pris, le lieu est désaffecté depuis trois ans. La pluie n’a pas cessé pour autant.

Le Nathan
On voit rouge en arrivant au Nathan, sans doute à cause de la couleur des murs. Ma foi, c’est très coquet. Ce n’est pas une heure de pointe, mais à vue de nez ça sent le pédé ici. Nous louchons sur la gorge du barman offerte par une béante échancrure. Les magazines mis à disposition achèvent de nous convaincre. Le Nathan est un bar homo où se rencontrent des homos.

Lausanne

Minuit Soleil
Nous débarquons dans un resto à l’ambiance méditerranéenne fort agréable. Le touriste américain en quête de sensations exotiques risque néanmoins d’être déçu. Pas d’homos dans la salle. C’est en levant les yeux que nous avons compris: la boule à facette a sans doute séduit les auteurs du guide… Peu de chance de faire une rencontre, à moins de détourner l’un de ces banquiers branchés. Vous savez, ceux qui aiment la house, s’habillent comme des pédés mais sont aussi hétéros qu’une machine à lessive.

Café Sud
Ce soir-là, ce sont des étudiants Erasmus allemands qui, à grand renfort de chopes de bière, constituaient l’essentiel de la clientèle de ce bar sympa à thématique latino-américaine. Mais nous avons très vite cerné ce qui a poussé les professionnels du tourisme à sélectionner cette adresse: la lampe à bulles en vitrine, genre Lava Lamp, l’accessoire qui trône dans tous les appartements de gays londoniens qui savent encore respecter les codes. Le reste de la déco, ce sont plutôt des boîtes de cigares et autres portraits du Che.

Bleu Lézard
Tout le monde connaît ce haut lieu des nuits lausannoises qui est certainement aussi l’un des plus gay-friendly. Fréquenté par une clientèle plus ou moins alternative, nous nous fondons sans coup férir parmi les chalands jusqu’à la petite table bistrot. Inutile de chercher les tapettes, ce resto-café est assez sympa pour nous les faire oublier.

Café Luna
Musique house, serveurs sexy, déco branchée… Le Luna pourrait être un bar gay. Il lui manque juste la clientèle… Les chances de faire des rencontres sont maigres, mais elles existent certainement. Au pire, c’est du côté des barmen que nous conseillerions aux touristes de passage de lorgner.

E.C. et D.P.