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Vieille comme la rue? La prostitution hier et aujourd’hui

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Mais qui veut la peau des soirées mousse?

Les soirées mousse ont toujours eu leurs détracteurs. Mais celle du 1er août dernier a débouché sur une violente contestation aux allures de règlement de compte personnel. Et sur la création d’un groupuscule de lutte anti-mousse…

«Quatre étages de discothèque transformés en baisodrome! J’avais tellement honte d’être gay.» Voici un extrait de ce qu’un garçon, qui dit s’appeler Andreas et avoir 23 ans, a posté sur le forum de discussion du site Boyinstinct.ch le 2 août dernier, en faisant référence à la traditionnelle soirée mousse organisée au MAD de Lausanne la veille. Il ne se doutait alors certainement pas de l’ampleur qu’allait prendre le cyber-débat: pas moins de 95 réactions ont été postées à la suite de ce message, dont certaines pour le moins enflammées. Morceaux choisis: «Il planait dans cet endroit un sentiment de fin du monde», «[le MAD est un] déplorable rendez-vous de pétasses mal baisées qui rattrapent le temps perdu», «un concentré de tout ce que l’être humain a de plus bas». Et encore: «Honte à ceux qui organisent de tels événements»; «La vitrine officielle de l’homosexualité, c’est le cul.»
La violence de certains propos, et leur caractère injurieux, diffamatoire voire calomnieux (accusant par exemple les organisateurs de laisser entrer des mineurs) a amené Alexandre Herkommer, qui organise les jungles depuis 15 ans, à contacter les responsables du site. Après une courte enquête et grâce aux adresses IP des expéditeurs (chaque ordinateur connecté à l’Internet dispose d’une adresse IP unique), il s’avère qu’une grande partie des messages avait été postée par un groupe de quatre personnes. Ces derniers ont utilisés des pseudonymes, âges et adresses emails différents et ont posté des messages des plus hargneux. «35 messages ont été rédigés par ces quatre personnes. L’une d’entre elles a même mis en ligne 17 réactions sous des pseudos différents», explique Jean-François Blanchet, le créateur de Boyinstinct.ch. «Nous avons épuré le forum en ôtant les messages émanant de ce groupuscule, ainsi que ceux ayant un caractère injurieux ou diffamatoire. De 95 messages, il n’en reste aujourd’hui que 26. C’est la première fois que nous sommes confrontés à un tel problème. Je suis dégoûté par ce comportement intolérable, même si je ne suis pas étonné que certains utilisent notre site pour régler leurs comptes.»
«Je n’ai pas de soupçons quant à l’identité de ces gens. Mais c’est visiblement dirigé directement contre moi, puisque je suis cité dans plusieurs messages», explique A. Herkommer. «Je suis hébété, stupéfait: il y a des gens qui doivent s’ennuyer prodigieusement pour pouvoir prendre le temps de faire cela.» Les petits malins en question ont par ailleurs contacté la presse et la gérance du MAD pour tenter de les alerter, en vain, sur ce soi-disant débat. Ce qui confirme leur intention de nuire, et va probablement obliger Alexandre Herkommer à porter plainte. «En cas de plainte, la police peut exiger des fournisseurs d’accès Internet qu’ils révèlent l’identité des propriétaires des adresse IP incriminées», précise Jean-François Blanchet.
La surveillance du forum et des petites annonces mises en ligne sur Boyinstinct.ch est constante, selon Jean-François Blanchet. Toutefois, lorsque l’on poste un message, il est automatiquement publié. «Au début, nous lisions tous les messages avant de les mettre en ligne. Aujourd’hui, nous avons dû automatiser afin de gagner du temps. Mais nous lisons quand même tous les messages après publication. La surveillance a lieu 24 heures sur 24 et nous réagissons très vite.» Selon Alexandre Herkommer, ce procédé n’est pas satisfaisant. Il faudrait vérifier les messages avant leur publication. Il n’en reste pas moins que cette triste affaire inspire à Jean-François Blanchet un fort sentiment de «ras-le-bol»: «J’ai créé ce site car je voulais faire quelque chose de bien pour tous les gays. Je m’investis énormément, ainsi qu’une dizaine de bénévoles, sans en retirer beaucoup d’argent. C’est frustrant de voir que des gens en profitent pour régler leurs comptes de manière si malsaine.» Il n’envisage cependant pas de fermer le forum.

Pas de sexe avant le PACS?

Si torpillage organisé des soirées mousse il y a eu, des réactions spontanées contre ce type d’événement émergent également du débat. Le retour aux «valeurs morales» frapperait-il aussi la communauté gay?

Débarrassé des messages émanant du groupuscule anti-mousse, le débat suscite néanmoins quelques interrogations. Plusieurs messages y expriment en effet un réel dégoût pour cette soirée. Et conduit même leurs auteurs à affirmer avoir eu honte d’être gay en voyant cette «boucherie». A travers ces sentiments de honte, on peut lire une remise en question plus large de l’image que la communauté LGBT souhaite donner d’elle-même, et un refus de la part de certains de s’identifier à ces pratiques («J’ai honte de porter cette image d’une communauté en déliquescence», «Je n’accepte pas qu’une minorité m’oblige à faire partie d’un groupe au comportement discutable et qui plus est d’être associé à des pratiques que je réprouve.») Comme si se rendre à la mousse faisait automatiquement de vous une abominable salope. Il est surtout étonnant de constater que plusieurs intervenants ne s’attendaient pas à ce que la soirée soit aussi… chaude.
Ces choqués des soirées mousse ne savaient-ils donc pas à quoi s’attendre? Essayons donc de se projeter dans la situation par une petite devinette: vous remplissez un club de pédés vêtus tout au plus d’un short mais plus généralement d’un petit slip de bain. Vous ajoutez quelques litres d’une mousse épaisse et opaque. Que se passe-t-il? Réponse 1: afin d’éviter d’être mouillés, les gens se rendent au premier étage et en profitent pour débattre de la nouvelle loi sur la péréquation fiscale. Réponse 2: la péréquation fiscale n’intéresse que moyennement les gays présents ce soir-là. Ils préfèrent donc profiter de la musique, quitte à être mouillés. Réponse 3: l’ambiance à l’intérieur de la mousse est des plus amicales, ce qui pousse certains à vérifier ce qui se passe à l’intérieur du slip de leurs voisins. Et cela peut éventuellement déboucher sur des pratiques encore plus amicales…
La soirée, dans son libellé, était annoncée comme «the ultra hot gay foam party». Pas besoin d’avoir fait une licence en anglais pour comprendre de quoi il s’agit. Mais surtout, comme le rappelle un intervenant sur le site, «les soirées mousses, c’est des soirées baises et ça a toujours été comme ça», alors pourquoi s’en offusquer? C’est bien ce que se demande un participant: «Ne me dites pas que ceux qui sont allés à la mousse pensaient trouver là-bas un tea dance…» A relever quand même que pour Damien, «la mousse était moyenne si vous appelez cela une soirée hard.»

Valeurs chrétiennes gaies?
De toute évidence, les insurgés des soirées mousses semblent vouloir démarginaliser les gays en se battant contre le sexe pour le sexe, le sexe à plusieurs, le sexe en public. Vaine tentative de ressembler à une norme qui, en fait, n’existe pas non plus dans le monde hétéro. Il a toujours existé une multitude de fantasmes sexuels et des gens pour les mettre en pratique.
Il est étonnant de constater que le désir d’intégration – louable – amène certains gays à devenir encore plus hétéronormés que la plupart des hétéros. Comme le relève un intervenant du cyber-débat, dans les soirées mousses «de vendredi et samedi, il y a des filles [qui] se sont faites sauter. […] Les hétéros se sont branlés à côté d’elles.» Et oui, les mousses «hétéros» ont aussi, comme on peut s’en douter, été le théâtre d’actes que la morale chrétienne réprouve. «Que les hétéros fassent la même chose ne nous permet pas d’en faire autant» a exprimé un autre participant. Etonnant renversement de rôle: voici que les gays deviennent les garants des valeurs morales ; les voici même affublés d’une mission, celle de devenir «plus normaux» que les gens «normaux». Cette volonté de conformisme prend beaucoup de sens aujourd’hui à travers la lutte pour le partenariat enregistré, qui justement impose une conduite politiquement correcte. Dans le cadre de cette campagne, la mousse fait tache. Comme le relève ironiquement et de manière excessive Saturnin, «les homos deviennent aussi chiants que les hétéros, et ce n’est pas peu dire».
Au-delà de cette boutade, ce débat est peut-être le signe d’un changement radical dans la mentalité de certains gays. Plus loin que le renoncement à toute revendication d’une quelconque différence, on prône le «retour à des valeurs morales», on se bat contre «l’avilissement du genre humain», comme le qualifie l’un des participants, contacté par email. A se demander si la droite ultra-conservatrice a aussi contaminé certains gays. Les jeunes couples gays de demain devront-ils attendre d’être pacsés avant de faire l’amour?