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mer 15 mai - sam 25 mai

«On te fait haïr ce que tu aimes»

Un jeune gay raconte la manipulation mentale dont il a été la victime au cours de pseudo-thérapies de conversion, alors que des voix s'élèvent pour faire interdire ces pratiques en Suisse.

«J’ai grandi dans les milieux évangéliques. L’homosexualité y est considérée comme un péché qui mène à l’enfer, mais qui est néanmoins curable», raconte A.B. Ce jeune homme, aujourd’hui âgé d’une trentaine d’années, a confié au journal dominical «Schweiz am Sonntag» comment il a passé dix ans de sa vie dans une de ces thérapies.

Il a été envoyé consulter à l’âge de 15 ans. Et dans sa communauté, il n’était pas le seul mineur dans ce cas, raconte-t-il. Son pseudo-traitement n’a pas été réalisé au moyen d’électrochocs, mais de manière bien plus sournoise. Lui qui déteste le football a été obligé d’entrer dans une équipe afin de s’habituer à côtoyer des hommes dans une situation non sexuelle.

Contrôle de soi
«Je devais aussi, par exemple, décrire un homme duquel j’étais tombé amoureux. Le ‘thérapeute’ posait alors des questions sur cet homme jusqu’à ce que je ne voie plus en lui que mes prétendues lacunes, mes faiblesses, etc. Et plus du tout la personne qui m’attirait.» L’objectif était d’arriver à un contrôle de soi tel que l’on peut entrer dans une relation avec une femme. «Sauf que ça ne marche pas comme ça, résume A.B. Le désir érotique ne se développe pas.»

«J’ai fini par me rendre compte que tout cela était une arnaque et j’ai cessé cette thérapie. Mais il m’a fallu au moins un an pour m’en remettre», raconte le jeune homme. Ses dix années de «conversion» ont provoqué d’énormes dégâts, estime-t-il. «L’ado qui n’a en réalité aucun problème se retrouve cassé, son estime de soi est détruite, il se sent inférieur. On te fait haïr ce que tu aimes.»

«L’Etat doit intervenir»
Pour Stephan Bischof, membre du comité de l’organisation gay nationale Pink Cross, ces pratiques d’un autre âge doivent cesser: «L’Etat doit intervenir pour mettre fin à ces pratiques sauvages de la part des fondamentalistes au sein des Eglises protestantes et catholiques». Une interpellation a été déposée la semaine passée au Parlement par l’élue zurichoise Rosmarie Quadranti (PBD), qui réclame l’interdiction de ces «thérapies» pour les mineurs sous peine de poursuites. Plusieurs Etats américains, dont la Californie et le New Jersey, ont déjà franchi le pas. Le Royaume-Uni étudie également des mesures.

Motivations malsaines
A.B. connaît une vingtaine de thérapeutes répartis en différents réseaux, qui proposent des «conversions» à des mineurs homosexuels ou présumés tels. Les séances, facturées de 60 à 80 francs, sont parfois prises en charge par les complémentaires – une pratique potentiellement abusive, relève la faîtière des assureurs Santésuisse.

La plupart des thérapeutes, selon le jeune homme, sont eux-mêmes des «ex-gays». «Leur motivation est souvent de se réaliser en tant qu’hétérosexuels, une sorte de zèle missionnaire, avance-t-il. Secrètement, ils peuvent ainsi vivre ainsi leur vie gay aux dépens de leurs ‘patients’. Ou mettre leur propre lutte intérieure sur leurs épaules. Bref, c’est une mise en scène dangereuse et hypocrite.»