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A quand le cyborgasme?

L’explosion d’Internet transforme les relations. La technologie vise à recréer toutes les sensations réelles. Science-fiction ou réalité?

Ça doit faire une semaine que je n’ai pas enfilé mon casque chéri, ma bulle, mon écran, mon terrain d’ébats. J’appelle Chris. C’est OK pour un quart d’heure. Mon cerveau m’envoie directement des impulsions. Je vois mon amant, je le ressens… explosion de plaisir.

L’orgasmatron n’existe pas encore. Il est né en 1992 de l’invention de l’Américain Mike Saenz, auteur de science-fiction et créateur des premiers CD ROMs de cybersexe. C’était avant Internet, les téléphones portables et gadgets qui permettent aujourd’hui de se rencontrer, de draguer et de ressentir par écran interposé.

Parmi ses prédictions, Saenz, qui n’avait pas prévu Internet, imaginait pourtant une succession d’évolutions du cybersexe entre 1992 et 2200. L’orgasmatron, prévu pour 2010, est un casque multifonctions qui donne des impulsions directement au cerveau, permet d’avoir des relations sexuelles avec plusieurs personnes simultanément, d’enregistrer la mémoire et de connaître des sensations comparables à celles réelles. Si nous n’en sommes pas encore là, les études actuelles nous en approchent à grands pas. Quant aux divers accessoires 3D tactiles que Saenz prévoyait pour 2000, c’est chose faite. Reste à savoir si leur usage se généralisera. Certains gadgets techniques ont en effet eu du mal à passer le cap initial de la curiosité. On pense au Lovegetty, invention japonaise et à son successeur le Flirtgetty, lancé en Allemagne en 1998. Petit porte-clé en forme d’oreille, le Flirtgetty lance des signaux d’invitation au contact dans un rayon entre 5 et 15 mètres. Il suffit, pour utiliser ce radar destiné aux célibataires en quête de contact, d’indiquer son sexe à la puce, «afin d’éviter tout malentendu»… puis de compléter cette information par son envie du moment: «Musique», «Sport», «Just for fun» ou «?». S’il y a dans le voisinage un autre porteur de Flirtgetty du sexe opposé, le message «Salut» apparaît sur l’écran. Si tous deux ont indiqué la même envie, c’est un «Bingo» qui annoncera le début d’une séance de drague en langage décodé. Les limites de ce gadget simpliste ont vite mis un frein à son développement.

Sensations réelles
Le téléphone portable, génération «transmission d’image», redonne une impulsion à ce type de contact codé. Le spot de Nokia, dans lequel une fille drague à son insu un homosexuel, reprend d’ailleurs de manière ludique les quiproquos qui peuvent naître de l’excès de simplification.

Mais ces deux exploitations des avancées technologiques restent tout à fait marginales par rapport à celui que connaît le Net.

Dès le début, deux pôles, souvent convergents, y ont trouvé un créneau florissant. Le domaine des chats et des rencontres d’abord, celui du sexe ensuite. Première industrie en termes de nombre de pages et d’investissements, le sexe a connu une quasi renaissance renommée cybersexe. La révolution est autant financière que technique. La manne n’est pas près de s’épuiser, le spectre d’expérimentations technologiques progressant rapidement. Les moyens d’accrocher le consommateur tendent à rendre l’illusion et les sensations de plus en plus réelles. Et c’est bien là que réside un des principaux paradoxes du réseau. A moins qu’il ne s’agisse d’une limite humaine.

Aux temps préhistoriques, soit il y a moins de dix ans, les chatteurs devaient se limiter à des échanges écrits et se contenter – comme à l’ancienne – de réponses différées. Quant aux adeptes du cybersexe, leurs sensations n’étaient guère plus affûtées que lors d’un film vidéo. Le seul sens directement stimulé était la vue. Très rapidement, et parallèlement aux progrès généraux de l’informatique, le son a permis de franchir la seconde étape évidente. On s’approche de l’imagination de Saenz lorsque l’on sollicite le troisième des cinq sens: le toucher. Les premières applications furent les joysticks associés aux consoles vidéos. Ergonomiquement bien pensés, ils n’étaient cependant pas polyvalents. Les labos de R&D y ont remédié: dans le créneau des souris, Logitech sort ces jours un modèle à réaction tactile. Chez les promoteurs du cybersexe, les zones de réactivité sont plus ciblées. Digital Sexsations commercialise depuis quelques mois une Black Box, sorte de transformateur qui peut être relié à quatre vibromasseurs à la fois… Elle est vendue avec un logiciel qui permet de composer le nom des endroits à stimuler (sexe, seins par exemple) et de varier l’intensité – entre 25 et 100% – ainsi que la fréquence avec laquelle ces «jouets» interactifs envoient leurs stimuli. Chacun et chacune peut piocher dans une liste de produits aux noms évocateurs: «Clit sauc», «Cyberskin Vibrating Pussy», «Nipple exciter», etc. Il suffit dès lors de se connecter sur l’un des sites de sexe optimisés par ce système pour ressentir en simultané l’une ou l’autre des pratiques vues à l’écran. Si la majorité concerne des films visuels, quelques histoires simplement rédigées figurent aussi au menu des partenaires de Digital Sexsations. Dans ce cas, c’est le fait de passer sur certains mots clés qui déclenche la participation par mimétisme… L’exploitation du kit est également conçue pour ceux qui veulent avoir des «relations sexuelles» avec des partenaires à distance. Le logiciel «FeelThe.Net Toolbar» permet, dans le cadre d’un forum ou d’une séance avec webcam de choisir l’activité (lécher, pénétrer, etc), la zone et la manière (doucement, passionnément, brutalement, etc.) dont on désire vivre sa relation sexuelle à distance.

Pascal Leleu, sexologue français, est un des seuls à avoir écrit un livre traitant des nouveaux modes de relations sexuelles. Dans son livre «Sexualité et Internet», il voit dans l’anonymat de la toile un moyen de se défouler, mais également une occasion où parler d’un sujet qui est encore aujourd’hui difficile à aborder. Et s’il est certain qu’il est vite possible de tomber dans le sordide, tous les consommateurs de ce type de relations n’ont pas des comportements de type pathologique.

Teledeldonics, qui se présente comme le futur portail de toutes les activités sexuelles interactives stimulées par ordinateur, confirme cette idée en affirmant que les relations sexuelles de ce type sont non seulement aux couples séparés d’avoir des relations, mais aussi à ceux qui, handicapés ou malades, souhaitent poursuivre une vie normale. La combinaison intégrale du futur, membrane imitant la peau humaine dont les capteurs seront activables par une console, y est déjà annoncée.

Fin nez
Quatrième sens que les chercheurs s’ingénient à stimuler artificiellement: l’odorat. Dans un contexte largement dominé par l’industrie du sexe, Digiscents a la particularité d’avoir été créée par deux hommes qui n’ont pas tenu compte de ce marché lors de leurs recherches. Dexster Smith et Joel L. Bellenson sont en train de synthétiser toutes les odeurs sur la base d’une centaine d’odeurs primaires. Leur ambition est de donner les moyens à l’industrie ou la publicité, par exemple, d’exploiter l’odorat. Ainsi, lorsqu’un consommateur fait ses achats en ligne, il pourra sentir l’arôme du vin, du bouquet de fleurs ou du cigare qu’il va ajouter à son caddie. Mais il y a fort à parier que les odeurs de chambre à coucher seront très vite proposées. Cette innovation à laquelle participe notamment Procter & Gamble, est la première démarche réellement sérieuse dans le domaine de l’odorat. Elle a d’ailleurs été couronnée en septembre dernier, du prix «Best New Technology» 2000. La vente de son logiciel iSmell est prévue dans les prochains mois. Mais serons-nous beaucoup à vouloir renifler ce que nous voyons ?

Reste-t-il encore quelque chose à inventer pour que les amants virtu-réels n’aient plus besoin de se rencontrer physiquement? Peut-être d’être capables de nous robotiser au point que nous puissions oublier le plaisir de se réveiller avec quelqu’un.