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Cybersexe, l’extase puissance X

Cybersexe, l’extase puissance X

Gang bang dans l’espace virtuel, robots érotiques et redéfinition des identités sexuelles… par-delà l’immortalité, les technoprophètes nous annoncent un orgasme augmenté d’une intensité cosmique.

«Ici la voix», dit Scarlett Johansson dans le film «Her», en s’adressant à Joaquin Phoenix transi d’amour, mais seul au milieu de son loft. Troublant objet de désir que le corps transparent d’Ava, le robot d’«Ex Machina». Alors que parmi les technopères, certains prônent déjà le mariage mixte entre humains et robots d’ici 2050, les scientifiques, Julian Savulescu et Anders Sandberg, eux, étudient l’usage de psychotropes pour réguler nos fonctions cognitives. Le but? Maîtriser les émotions qui nous fragilisent afin, notamment, d’éviter la dépendance à l’autre, qu’il soit robot ou humain. Dans son essai, Sex and the Posthuman Condition (Palgrave Pivot, 2014), Michaël Hauskeller, universitaire au Royaume Uni, parle des «anti-love technologies» comme un moyen de changer son orientation ou ses préférences sexuelles, selon qu’on les considère comme toxiques ou bénéfiques.

Pour le philosophe abolitionniste David Pearce, il faut éliminer la souffrance par tous les moyens existants et à venir. Exit l’amour, pourvu que ce soit l’orgasme ultime. Ainsi le bioéthicien, James Hughes, nous promet des changements de sexe versatiles et ludiques. Pourquoi, selon lui, se contenter d’une simple amélioration cosmétique, alors que nous pourrons modifier nos zones érogènes pour en décupler les sensations, et même concevoir des organes sexuels totalement nouveaux?

self-service
Les spéculations transhumanistes véhiculent l’idée que la machine agira à l’intérieur du corps humain et pourra même le phagocyter. Le mind-uploading étant l’avènement qui consacrera l’immortalité, prévue pour 2045. Parlant d’existence sérielle, Michaël Hauskeller analyse le fantasme de la duplication de soi comme la solution à l’un des dilemmes de l’Humanité: la peur des autres et la peur de la solitude. N’étant pas tout à fait un autre, notre alter-ego n’est plus envisagé comme une menace. N’étant pas tout à fait soi, nous l’accepterions plus volontiers, à partir du moment où notre avatar se dissimule sous le masque de l’autre. Par conséquent, l’hédonisme et la jouissance absolue du projet transhumaniste ne seraient rien moins que de l’onanisme.

«Dans tous les cas, précise Hauskeller, avoir des relations sexuelles avec un robot, une sexdoll, ou un dispositif permettant l’illusion d’une relation avec une entité différente de soi, revient à pratiquer la masturbation.» Ces sextoys grandeur nature seront par ailleurs programmables pour être aussi docilement récalcitrants que serviles. Pour Vincent Menuz, docteur en biologie, chercheur associé au groupe Omics-Ethics et cofondateur de NeoHumanitas à Genève, «l’un des problèmes de l’affection que certains projettent déjà sur des robot sexuels, c’est la non-réciprocité.» Selon lui, sans réciprocité, il s’agit d’un rapport de subordination, assimilable à de la prostitution…

LOST IN TRANSITION
Militante pour la liberté morphologique et présidente de Humanity+, Natasha Vita-More déclarait dans un entretien à «Vice»: «L’humain du futur doit pouvoir être un mâle ou une femelle, ou un mâle et une femelle, il peut être androgyne, aucun des deux genres, ou encore une combinaison des genres.» Pionnière, la femme d’affaires américaine, Martine Rothblatt effectue son changement d’identité en 1994. L’auteure de L’Apartheid des sexes – Un manifeste pour la liberté de genre a par la suite lancé le mouvement transhumaniste Terasem et créé sa propre entreprise pharmaceutique, United Therapeutics Corp. Pourtant, Michaël Hauskeller l’affirme: «Nous sommes loin des possibilités infinies de modifications de genre décrites par James Hughes.» En revanche, le corps et la manière dont nous l’appréhendons a priori comme une erreur de la nature sera l’un des enjeux majeurs de la société posthumaine. Hauskeller confirme: «Le storytelling propagé par les fervents laudateurs de l’Humanité augmentée va dans ce sens, et je pense que nous allons vers une contrôle accru du corps et, par conséquent, de nos vies.»

Face aux géants du numérique (Alphabet ex-Google et Apple en tête), lancés dans la course au Big Data et la révolution des NBIC (la convergence entre les nanotechnologies, les biotechnologies, l’intelligence artificielle et les sciences cognitives), le changement de paradigme s’accompagne déjà de mouvements contestataires et dissidents, bioconservateurs, body hackers, gender hackers, etc. Bientôt, il faudra choisir son camp.

Qu’est-ce que le transhumanisme?

Le transhumanisme est un mouvement de pensée en provenance des pays anglo-saxons, qui prône l’usage des technologies pour améliorer l’Humain, avec pour objectif l’immortalité. Selon Vincent Menuz, cofondateur du think tank NeoHumanitas à Genève, la transhumanité c’est le passage où l’être humain en tant qu’espèce se transforme pour tendre vers le posthumain.