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Les stéréotypes font rigoler

La campagne de la nouvelle banque en ligne anglaise Egg repose entièrement sur les stéréotypes. Peut-on sourire ou faut-il réagir contre la perpétuation des clichés?

Partie à la conquête d’un marché français peu habitué aux cartes de crédit, Egg fait une offre inédite à ses clients: elle leur rembourse 1% du montant annuel payé avec la carte. Pour promouvoir ce «cash back», la banque en ligne a sorti le grand jeu: quatre films diffusés 2300 fois, quatre doubles pages dans cinquante titres, le parrainage de vingt-quatre programmes télévisés, une campagne de marketing direct et des banners sur internet ont pour objectif de réfuter l’idée reçue selon laquelle «ce n’est pas en dépensant de l’argent qu’on en gagne». La filiale de Prudential, géant anglais de l’assurance, a choisi de s’attaquer aux idées reçues les plus triviales mais les plus connues pour changer le rapport des Français à l’argent. En quatre spots absurdes à l’humour cynique typiquement anglais, Egg démontre que des affirmations telles que «les Suisses sont lents», «le sport, c’est bon pour la santé», «les chats retombent toujours sur leurs pattes», «la soupe, ça fait grandir» ne sont pas toujours vraies. Une façon subtile de ne pas affirmer que dépenser de l’argent permet toujours d’en gagner. Dans la presse, la banque s’attaque à deux autres clichés: «les blacks ont un grand sexe» et «les blondes n’ont rien dans la tête». Difficile de s’empêcher de sourire….

Œufs brouillés
Pour s’attaquer à la première des idées reçues, l’œuf british (egg) invite les Français à réviser leur manière de penser. Non, la soupe ne fait pas forcément grandir, les Suisses ne sont pas irrémédiablement lents, mais oui, on peut gagner de l’argent en en dépensant. C’est toute l’idée contenue dans sa signature «Egg, une autre idée de l’argent».

Cette intention positive de l’annonceur crispe toutefois un certain nombre de personnes, dont la Meute, l’association française contre la publicité sexiste, se fait l’écho. Emmenée par Florence Montreynaud – fondatrice des Chiennes de garde – la Meute se bat depuis deux ans pour éviter la perpétuation de clichés dégradants. Dans la lettre de protestations qu’elle a écrite à Egg, la Meute qualifie leurs annonces de «racistes et sexistes». Egg «prétend dénoncer des idées reçues grâce à des images illustrant le cliché inverse (…), ce qui est tout aussi méprisant pour les personnes représentées que pour la clientèle visée. En outre, les images montrées n’ont aucun rapport avec le service vanté. Il faut en finir avec ces campagnes qui ont pour unique ressort la provocation (…), une technique basique pour accélérer la conquête de la notoriété et une nouvelle forme de l’arrogance et du tapage qui parasite les médias». La Meute demande à Egg de cesser de diffuser ces publicités et de veiller à l’image non sexiste de ses prochaines publicités. Faute de réponse satisfaisante, les signataires s’engagent à ne jamais avoir recours à leurs services et à inciter leur entourage à faire de même.

De manière générale, les quelque trois mille signataires du Manifeste estiment que sous couvert de création, les publicitaires imposent des normes et fantasmes qui utilisent hors de propos l’image du corps et les représentations de sexualité ou de violence. Ils renforceraient les clichés sexistes en «montrant les femmes entre elles comme des rivales jalouses ou comme des lesbiennes exhibitionnistes, en représentant les hommes comme des machos, des hommes-objets ou des papas-poules, ou encore en enfermant les femmes dans des rôles tels que maman ou putain, femme-enfant ou salope, ménagère ou femme-objet», etc.

En exigeant l’arrêt des représentations dégradantes, dévalorisantes ou déshumanisantes des êtres humains et des rapports entre eux, la Meute rappelle aux publicitaires qu’ils n’ont pas tous les droits et que le corps n’est pas une marchandise. Au nom du respect de la personne et d’une sexualité qui exprime un désir réciproque, elle leur demande de renoncer aux représentations dégradantes, réclame la promulgation d’une loi antisexiste pour encadrer les pratiques publicitaires et monte systématiquement aux barricades… quitte à souvent être accusée de manquer d’humour. Un débat qui pose une fois de plus la question de la responsabilité des annonceurs et des médias. Mais invite aussi à se redemander si on peut vraiment rire de tout…

Tous les gays dans le même panier
Parmi les stéréotypes préférés des publicitaires, la communauté LGBT. Pour contrer ce simplisme, the Commercial Closet, un site qui répertorie les pubs homos et les classe selon la qualité de l’image qu’elles véhiculent, vient de rédiger six recommandations à l’intention des responsables marketing et des agences. Elle espère ainsi les aider à créer des publicités – destinées au marché gay ou au grand public – respectueuses de la communauté:

1. Intégrer et diversifier
Dans le cas de mise en scène d’un groupe, elle recommande d’inclure des membres LGBT d’origine, de race et d’âges divers, et de ne pas cantonner les références à la sphère familiale à la seule communauté hétéro.

2. Eviter l’humour gras
Comme c’est le cas lorsque les homos et les transsexuels sont présentés comme des menaces pour l’homme hétéro.

3. Eviter les généralisations
C’est le cas lorsque les gays sont systématiquement efféminés, les transsexuels menaçants ou outranciers et les lesbiennes, chics.

4. Utiliser les médias locaux
La population extra-citadine est souvent faussement considérée comme inapte à gérer les thématiques gay.

5. Etudier son groupe cible
L’analyse approfondie d’un marché peut permettre à une entreprise de découvrir que nombre de ses clients potentiels appartiennent au groupe LGBT. The Commercial Closet recommande de les inclure dans leurs messages grand public au lieu de les cantonner à des campagnes ciblées sur le marché gay.

6. Etre cohérent et avoir confiance
Ne pas interrompre ou modifier une campagne en cas de critiques, mais y répondre, par exemple, en expliquant le concept de diversité.

L’Italien mafioso, le footballeur abruti, le lunetteux studieux, l’Asiatique karatéka mais aussi le pitbull méchant… les stéréotypes sont légion. Dans la publicité, ils permettent de cibler d’un seul coup la ménagère de moins de cinquante ans ou les ados urbains détenteurs d’un portable. Une schématisation extrême qui va de pair avec une communication de masse. Le développement du marketing one-to-one permettra peut-être de communiquer de manière plus individualisée. En attendant, il est toujours possible d’écrire aux sociétés incriminées. Une lettre de réclamation représente quelque mille personnes heurtées qui ne se sont pas manifestées. La Meute dixit.